Lleno por favor – Panaméricaine

Comment faire pour traverser un pays si long et si peu large ?

Ici pas de train, le réseau semble développé pour une grande partie en faveur du transport de minerais, surtout du cuivre, qui est le fer de lance de l’économie chilienne.

Direction le Nord. Sorti de Santiago la capitale, la seule route possible est la Ruta 5. Tronçon chilien d’une des plus grandes routes du monde, plus communément appelée la panaméricaine! Reliant le Sud du Chili jusqu’aux Etats-Unis, elle longe une grande partie de la côte Ouest du continent Américain.

Ah ces grands espaces. Aah cette route droite filant vers l’horizon. On a vite envie de tracer la route jusqu’aux USA comme dans un bon vieux Point Limite Zero! On y pense, puis après on regarde pour rigoler l’itinéraire sur le GPS, puis on oublie tout de suite cette idée ! Le nombre impressionnant de camions qui se tapent la route là sont des grands malades !

La distance paraît énorme sur la carte quand on veut rallier le prochain point d’intérêt. Enorme, mais en fait pas tellement car les points d’intérêts sont partout ici !

Le paysage change tellement entre le Sud et le Nord du pays… Un condensé des différents climats des régions habitées du globe. Juste magnifique. Une chose ne change pas, le coucher de soleil de la côte Pacifique qui reste pour moi un de mes préférés. Après celui de la côte bretonne, évidemment.

Pour ne rien louper dans ce pays quand tu as peu de temps, rien de mieux que le Pickup pas cher et résistant à toute brutalité extérieure du terrain. Vamos Chico El Pacifico (baptisé par Anna)! On s’arrête toutes les heures devant un paysage qui fait rêver pour en contempler temporairement la beauté et imprimer tout ça dans le top 10 personnel des meilleurs fonds d’écrans mentaux.

Lleno por favor! Une des premières phrases apprises en espagnol du voyage. Le plein s’il vous plaît ! Et oui ici on dilapide assez vite le réservoir d’El Chico.

Le chilien

La première chose à dire sur le chilien, c’est qu’il est accueillant ! Enfin… Après s’être dépêtré à se faire comprendre avec deux mots d’espagnols et de grands gestes de description ! Et oui ici pas d’anglais, et l’espagnol chilien est très mâché par les habitants et est prononcé à une vitesse incompatible avec notre niveau actuel !

Bon, si on met ce point de côté, les chiliens que l’on rencontre sont très serviables dans la plupart des cas et mettrons un point d’honneur à vous aider lorsque vous en avez besoin.

Le chilien est un philosophe du cool, au milieu de ce décor magnifique pour lequel il voue, selon les régions, un culte certain. Pour les civilisations originales de ce pays, comme le peuple Mapuche ou Atacamenos, la terre est la mère et mérite notre respect. Mais ce n’est malheureusement pas la vision communément admise au niveau du gouvernement du pays Chilien… L’économie et le profit prime sur l’écologie dans tous les cas. Voilà pourquoi on peut observer une certaine contradiction en sillonnant le pays entre villes et routes polluées de plastiques et déchets en tous genres vs parc nationaux conservés.

Jésus est partout

Le peuple Chilien est très religieux. Le long de la panaméricaine, on remarque plein de petites constructions ornées des symboles du christianisme. En regardant de plus près et surtout en voulant savoir “mais c’est quoi ces trucs ?” En s’arrêtant auprès d’un des MILLE petits édifices, il s’avère que ce sont des petits temples à la mémoire des morts sur la route. Ils construisent ce type de mémorial, les animitas en mémoire de leurs proches morts sur la route. Tout matériel est bon pour construire les animitas. Il y en a même certains avec des croix faites de panneaux réfléchissants. Ouais ouais. Ou même une voiture du modèle avec lequel la personne fut accidentée, surélevée sur des parpaings.

Le chaud et le froid

A 5000m d’altitude sur la route menant à l’Argentine via l’Atacama, le mélange des éléments est incroyable. On y rencontre l’intense désert où la vie se fait rare mélangé à la glace immaculée soufflée par des vents violents et glacials. Passer de la tempête de sable à la tempête de glace en moins de 2 minutes, se frayer un chemin sur l’altiplano en se demandant si c’était bien raisonnable de venir jusqu’ici et de monter aussi haut sans préparation. L’air se fait rare et le souffle s’intensifie. La pression diminue et l’esprit semble s’envoler, soudain on se ramasse une immense fatigue. Même le moteur de la voiture est au bout de sa vie, on ne peut dépasser le 50 km/h.

Mais on y va et on y arrive enfin : le salar de Tara ! Les pensées précédentes sont remplacées par l’émerveillement et la stupéfaction devant ce paysage semblant tout droit sorti d’une BD de science-fiction. On imagine la mise en scène d’un héros explorant une nouvelle planète étrange et inconnue. Le vent nous empêche d’aller à pied très loin mais ça en valait bien la peine !

Les soirs nous profitons d’un ciel immaculé pour observer les étoiles, avec tous les mythes des civilisations anciennes et leur relation avec la voute céleste contée par des passionés locaux. Sortez vos téléscopes! Nulle part ailleurs sur cette planète on peut profiter aussi bien de la vue sur l’immensité de l’univers. La voie lactée est impressionante à voir dans toutes ses couleurs, ça donne des frissons!

La complainte du beurre salé

Les salars ne manquent pas au Chili, ce pays dispose incontestablement d’une grande réserve de sel. Du sel les copains ! De part de son partenariat officieux depuis 1914 avec la Bretagne, peu de gens savent que la guerre menée contre les artisans du terme de la crêpe salée n’aurait pas été réalisable sans l’aide du peuple chilien et de son sel contre les envahisseurs Est-Britania. Le terme fut sans conteste gardé sous le nom biblique “galette de blé noir” après cet entrechoc ayant bousculé l’ordre mondial. Depuis, moult bateaux croisèrent, transportant bien à leur bord non du cuivre mais, bien comme vous vous en doutez, du sel pour notre beurre régional et ainsi permirent de mixer les plaisirs.

Lisez les journaux mes chers compatriotes ! Vous y apprendrez sûrement la pénurie de beurre se profilant à l’horizon, eh bien oui! Votre suspicion a touché au but ! Cette mascarade est en fait un complot breton pour bien sûr augmenter le prix du beurre salé en métropole et dans le monde entier afin de consolider notre chère langue bretonne.

Quel est le rapport me diriez-vous ?! Et bien c’est très simple chers amis, car loin s’en faut de rappeler que notre cher gouvernement a supprimé les emplois aidés en ce début de quinquennat, peu de gens savent qu’une grande partie de l’enseignement de notre langue régionale est assurée dans les écoles Diwan par ces mêmes personnes licenciées. “Que les parents mettent la main à la poche s’ils veulent que leurs enfants continuent de parler breton !” S’exclamait encore dernièrement une élue d’En Marche au micro de Radio Emeraude. Stupide personnage ! Gougnafier ! L’école doit rester gratuite et permettre de continuer à faire vivre notre culture ! Et oui jeune militant extrémiste de gauche de Perros-Guirec, j’entends le doux son de révolte être entonné par ta voix rocailleuse ! Scandale et ainsi de suite, la hausse du prix du beurre, vous l’aurez deviné, servira évidemment à nous payer des profs bilingues.

Prochaine étape le rationnement de cochons et de patates, fini les saucisses au barbecue du dimanche, on verra si tu rigoles quand tu pourras plus sortir la barbac et les frites à l’apéro du soir de match !

Bref. Le Chili. Ah oui, euh je disais quoi moi maintenant ?

T’as de belles couleurs tu sais !

Vide. Un espace fini de paysages semblant infinis, le désert. Se sentir seuls et loin, abandonnés mais libres. Libres de ressentir la vraie nature de cette nature dure et cruelle. Ressentir cette lente monotonie de reliefs répétitifs se complaisant dans des couleurs pastel et des dégradés si magnifiques.

La nature nous offre son bac à sable de création, vierge et près à être modelé mais hostile à notre mode de vie.

Rien à l’horizon, les couleurs sont ternes et l’esprit est à la dérive entre méditation et contemplation.

Et soudain le miracle, un festival de couleurs roses, bleues et blanches ! L’artiste Nature nous dépose son cadeau éphémère, le désert fleuri nous est offert devant nos yeux ébahis. Seule demeure en nous la vérité après ce spectacle : il semble que la seule vraie réponse de la nature à la pénurie est simplement la beauté !

Elsa et Damien

Tellement de plaisir à revoir la bouille de nos chers aventuriers ! Concrétiser leur rêve semble leur réussir et c’est tant mieux ! Pour le peu de jours passés ensemble, je remarque les habitudes prises lors du voyage :

– Piquer toutes les sauces ou sel/sucre possibles lors des haltes restaurant (faut bien remplir les réserves !)
– Ranger minutieusement le sac et ne pas laisser dépasser le moindre bout de textile (des vrais rois de Tetris)
– Se débarrasser de tout ce qui n’est pas indispensable pour limiter le poids du bagage.
– Damien ne peut pas fonctionner sans café (ce point-là n’a donc pas changé)
– Elsa mène le rythme comme à son habitude, motive les troupes et tyrannise ses camarades en cas de non-respect des horaires et des règles mises en place (Une vraie prof !) (Sans rancune ahah !)
– Pas de divorce à l’horizon, c’est bon signe 😀

3 Jours à la campagne chilienne dans une cabane en bois dans la forêt, rien de tel pour des retrouvailles bien chaleureuses !