Il n’aurait pas fallu poser la question si j’allais l’aimer ou pas. Je me souviens de moi, regardant le paysage incroyable près de Grenoble avant partir. Je me suis demandée avec un peu d’inquiétude et de honte: est-ce que je vais pouvoir aimer un désert sans le moindre signe de la vie?

Je suis déjà rentrée du Chili, j’ai repris le travail, le train m’emmène vers la maison. Aujourd’hui j’ai pris un siège de l’autre côté. Et le moment vient où j’appercois une petite surface en sable de la montagne, jaune d’or sous le coucher du soleil. Et je dis presque en haute voix: Atacama!

Et toutes les magnifiques images que j’ai vues dans ce désert commencent à revenir dans ma tête, je suis complètement perdue dans mes souvenirs jusqu’au moment où le haut-parleur annonce Bienne et je dois déscendre.

Je ne sais pas beaucoup de poèmes par coeur, cette phrase maintenant est une exception.

“Tigre! Oh Tigre! Toi qui luis
Au fond des forêts de la nuit!”

Ca signifiait pour moi Atacama!

Il n’aurait pas fallu poser cette question concernant l’Atacama. Je vais l’aimer jusqu’à la fin de ma vie.

Le Chili est un pays long et étroit, mais tellement que j’ai eu souvent l’impression qu’on a même pas la place pour tourner à gauche ou à droite. Il y a par contre un endroit où il ne faut pas rater les panneaux et c’est San Pedro de Atacama. Pour y aller on traverse le désert d’Atacama, dont le nom n’a pas disparu de ma tête même si j’avais fini mes leçons géographiques il y a plus de dix ans. Atacama – j’aime bien le répéter. Il y a tellement d’enigmes dans ce mot comme dans les peintures des grottes et on va ressentir ce mystère encore plus avec le temps que l’on passe ici.

Je me souviens que j’ai appris que dans le désert la journée il fait chaud, la nuit il fait très froid et il y a des tempêtes de sable contre lesquelles on se protège par de grosses écharpes. Et c’est exactement comme ca! A San Pedro j’ai vécu une de mes nuits les plus froides au dessous de deux couvertures, un sac de couchage, deux pulls thermos, une écharpe et un bonnet. Bon, il faut que je dise aussi qu’au Chili à cette période c’est mi-hiver, ce qu’on oublie facilement avant de partir de métropole avec 30 degrés. Pourtant je ne donnerais pour rien mes expériences météorologiques vécues ici.

Ensuite la poussière. La poussière est partout, dans ton nez, dans tes yeux, dans ta bouche, dans tes chaussures. Et du coup sans lunettes et d’autres types de protections une petite ballade désertique devient assez rapidement désagréable. Au premier moment cette situation peut paraître étrange, surtout quand par example tu n’oses pas sortir de la voiture parce que le vent est tellement fort qu’il pourrait arracher la porte de ta main. Mais après une minute d’hésitation je saute de la voiture et je dis: “Viens la nature! Montre-toi!”

Et au Chili tu vas avoir plein de moments comme ça, où la nature avec toutes ses puissances et beautées t’entoure, quand tu écoutes les vagues du Pacifique de l’intérieur de la tente le matin, ou tu observes la première fois Saturne avec un téléscope ou quand le soleil se couche avec des couleurs jamais-vues sur les volcans de 4000 mètres.

Ma découverte la plus grande pendant ce voyage était que le néant peut être beau et je n’aurais jamais pensé qu’il pouvait se nicher si facilement sur mon coeur.