Moi qui adore l’eau, j’ai été servie. Nous avons par hasard débarqué en Thaïlande, et plus particulièrement à Chang Mai, pendant les jours les plus chauds de l’année, quelques jours avant le festival de l’eau.

Pour ceux à qui, comme moi il y a une semaine, ça ne dirait rien, il s’agit d’une gigantesque bataille d’eau dans les rues. Non pardon, il s’agit d’un rituel bouddhiste pour célébrer le nouvel an en se purifiant. Ce qui revient à peu près au même…

Pendant trois jours, tous les robinets sont ouverts.

L’eau, comme toujours, élément purificateur, élément de vie.

L’eau dont la Thaïlande commence à manquer cruellement puisqu’un tiers de l’eau y est polluée.

Parenthèse culturelle :

Le songkran marque le début de l’année d’après le calendrier lunaire puisqu’ici, nous venons de passer en 2560, hé oui, nous avons 543 ans d’avance sur vous bande de petits jeunots !

C’est l’une des fêtes les plus importantes et elle dure trois jours complets. Dans tout le pays, les gens se rendent au temple (attention ! Mouillé, tu ne peux pas rentrer ! N’arrosez pas les fidèles !). Comme pour un grand nettoyage de printemps, toutes les statues sont sorties et on les arrose d’eaux parfumées pour éloigner la malchance. Même chose pour les vieillards, non on ne les sort pas pour les arroser, on leur mouille les mains contre leur bénédiction en quelque sorte.

Lors d’une très belle procession avec costumes, danseuses, musiciens et tutti quanti, certaines statues sont promenées sur un palanquin dans les rues pour que tous puissent les asperger et espérer une année chanceuse.

Parenthèse dans la parenthèse, c’est vachement plus sympa à contempler, un bouddha, par rapport à, disons, un jésus. Tous ces visages dorés, souriants et sereins c’est plus réjouissant qu’un mec livide, maigre et ensanglanté sur une croix. Paradoxal quand on sait (depuis une semaine toujours) que si le calendrier occidental commence avec la naissance de Jésus le calendrier lunaire commence au contraire avec la mort de Bouddha. Je vous laisse méditer…

Fin de la parenthèse culturelle.

Dans les faits, la ville est un gigantesque terrain de jeu. Comme il n’y a pas d’autres vacances que les jours fériés (Merci pour vos combats, ô nos ancêtres qui n’êtes pas que gaulois !) tout le monde en profite. Si tu ne veux pas être mouillé, il suffit de rester chez toi. Une fois ce constat fait, toute personne dans l’espace public peut donc être considérée comme une cible potentielle.

Armés de bacs d’eau et de seaux, des équipes de trois à dix personnes campent, avec sono et caisses de bières, le long des routes. Des 4×4 tout aussi bien pourvus, toute bennes ouvertes, les affrontent. Pour tous, les scooters sont une cible parfaite. Les petits joueurs qui se déplacent à pied, pour la plupart des touristes ravis, ont des bazookas à eau.

Résultat, tout le monde se tire dessus, rigole, échange. On remplit son arme dans le bac de celui sur qui on a épuisé ses munitions tout en se préparant au seau d’eau dans la nuque. Les vicieux font fondre les glaçons, les sympas te puisent l’eau directement dans la rivière, les rusés font payer l’eau (vu à Bangkok), les équipés portent, par ordre de priorité :

– Un pistolet fluo ou un pack-back (existe en Hello Kitty, bisous les louloutes !).
– Un sac ou une pochette étanche pour le portable (Hello Kitty toujours disponible).
– Des lunettes de protection transparentes (ou fluo) en plastique parce qu’un jet mal placé ça peut faire mal.
– Une gopro dans son étui.
– Un poncho en plastique transparent (ou fluo).
– Une perche à selfie pour ladite gopro.
– Une casquette transparente en, devinez quoi, plastique fluo…

Bon, nous on avait juste une bouteille d’eau astucieusement trouée, pour deux, et ça passe. Je défendais Damien le motard, en une rue nous étions intégralement trempés. On a rendu le scooter sous les rires de la loueuse, repris notre statut de piéton et investi dans une deuxième bouteille d’eau…

On a une technique du tonnerre. Je passe devant et provoque l’adversaire par un jet gentillet dans le cou, il se retourne pour me courir après, Damien arrive pour la rafale. Génial ! Ça me fait rire rien que d’y repenser. Et les rires des plus petits dans les piscines gonflables quand on joue à cache-cache avec eux, planqués derrière une voiture ou un poteau. Et les seaux renversés sur ceux qui les tenaient. On arrose et on reste pour que l’autre puisse se venger, on tend l’épaule même.

J’essaie d’imaginer ça en France, dans des villes d’eau. A Thonon, à Marseille, qu’est-ce que ça donnerait ?

En tout cas, c’est sûr, la prochaine fois, on reviendra en version commando. Des volontaires ?